Florence Cousin : Accompagner les communicants vers une autre manière de faire leur métier

Signataire dès 2009 de la charte pour une communication responsable de l’Union des annonceurs, la SNCF a mis en place une démarche de concertation interne et externe originale. Un code de communication responsable pertinent et opérationnel a ainsi été publié en 2011. Florence Cousin, qui pilote cette démarche, nous explique que l’un des enjeux est maintenant d’intégrer ces réflexes et réflexions dans le quotidien des 500 communicants du groupe.

Bonjour Florence Cousin. Vous travaillez à la SNCF au poste de « responsable de la communication au développement durable ». Comment êtes-vous arrivée à ce poste, qui doit en faire rêver plus d’un ? Quelles sont vos principales missions ?

Cela fait vingt ans que je suis à la SNCF, cinq ans à la direction du développement durable. Au démarrage, mon parcours n’est lié ni au développement durable ni à la communication ! C’est vraiment grâce au hasard des opportunités que je suis arrivée à ce poste.

Je suis notamment en charge de la réalisation du rapport RSE du groupe, et auquel contribue une centaine de personnes. Je suis en charge de l’information en interne sur le DD, via notamment une newsletter, l’alimentation de l’intranet, mais aussi de la formation avec des modules développées par type de métier. Je co-pilote également en binôme avec la direction de la communication la mise place de la démarche de communication responsable auprès des communicants de l’entreprise.

La SNCF est un acteur engagé depuis de nombreuses années en faveur du développement durable. À partir de quand la fonction communication a-t-elle été impliquée ? De quelle manière ?

Effectivement, l’engagement de la SNCF en faveur du développement durable est une longue histoire. Par exemple, en matière de prévention des risques, nous menons des actions de sensibilisation des jeunes à la sécurité ferroviaire et au respect des autres depuis plus de « 30 ans. Nous nous appuyons pour cela sur un réseau de 450 agents (conducteurs, contrôleurs…) qui sont formés à l’intervention en milieu scolaire et qui rencontrent 220 000 jeunes chaque année du CM1 jusqu’au lycée.

Petit à petit, les domaines d’actions se sont élargis et d’autres réseaux ont été créés pour mettre en place des actions dans le domaine de la réduction de nos impacts environnementaux et sociétaux :

  • Le réseau environnement est en charge du respect de la réglementation et de la prévention des risques de pollution
  • Le réseau des managers de l’engagement sociétal : il organise avec des associations partenaires des chantiers d’insertion dans l’entreprise en partenariat, la lutte contre l’errance dans les gares notamment…

Et depuis 3-4 ans, nous travaillons sur le cœur de notre business pour faire évoluer notre offre et nous nous appuyons pour cela sur un réseau de pilotage stratégique ».

Ces réseaux sont coordonnés et animés par la direction du développement durable. Notre rôle est de faire rentrer des pratiques et process plus responsables dans tous les métiers. Des outils sont en cours de développement pour organiser la remontée des indicateurs. Finalement, nos engagements concernent les trois piliers du développement durable.

La fonction communication est réellement impliquée depuis 4 ans. Nous sommes membres de l’Union des annonceurs (UDA) et la charte pour une communication responsable est sortie en 2008. Il a fallu quelques mois pour que la Direction de la communication s’en empare et prenne la décision de la mettre en œuvre : nous l’avons signée en 2009.

Quelle a été la traduction concrète de la signature de la charte ? Dans le film « Innover en communication responsable », vous indiquez avoir mis en place un groupe de travail interne et un groupe « miroir ». Pouvez-vous nous en dire plus ?

La première question que l’on s’est posé est la suivante : que signifie « communication responsable » pour notre entreprise ? Nous avons mis en place un groupe de travail composé de quelques personnes volontaires, de plusieurs métiers et niveaux : des personnes de la direction de la communication (animation réseau, publicité, édition…), un chargé de communication en région, un communicant de l’activité régionale TER. L’objectif était d’avoir une vision assez complète de ce que sont les métiers de la communication chez SNCF.

Tout au long de l’année 2010, accompagnés par l’agence Sidièse, nous avons défini le périmètre et les objectifs de la démarche. L’idée était de produire un document assez synthétique pour pouvoir en parler et déployer la démarche sur le terrain auprès de tous les communicants de l’entreprise.

Puis nous avons présenté notre projet de code de communication responsable à un groupe d’acteurs externes, composé de représentants de l’ADEME, de l’UDA, de la Fédération nationale des usagers des transports (FNAUT) et de France Nature Environnement (FNE). La réunion a été très riche. Leurs réactions nous ont poussés à être plus ambitieux dans les objectifs qu’on souhaitait atteindre. Par exemple, la personne de la FNAUT nous a suggéré d’intégrer dans notre démarche la question de la simplicité de l’information pour les clients. L’ADEME et l’UDA ont souligné notre capacité d’entraînement des autres acteurs (par exemple dans notre politique d’achat responsable des produits et services de communication). Nous avons compris que ce n’était pas suffisant de faire notre travail correctement, mais que notre rôle était aussi d’entraîner nos partenaires et de le faire savoir.

Nous avons pris en compte ces remarques et nous avons finalisé notre code au début de l’année 2011.

Une fois cette démarche de communication responsable définie, comment a-t-elle été déployée et reçue en interne ? Avec quels outils ?

Le code de communication responsable de la SNCF comporte quatre parties :

  • Mieux dire – Montrons du respect. Témoignons du respect aux personnes (diversité) et à l’environnement, avec un souci de franchise et de transparence.
  • Mieux faire – Éco-concevons. Limitons l’impact environnemental de notre action en rationalisant nos réalisations, de leur fabrication, à leur logistique, jusqu’à leur fin de vie.
  • Mieux collaborer – Appuyons-nous sur les forces qui nous entourent. Consultons les parties prenantes internes ou externes, choisissons des partenaires responsables et des produits certifiés, favorisons l’économie solidaire.
  • Mieux avancer – Évaluons et partageons les progrès. Évaluons systématiquement nos actions pour identifier les succès comme les points de progrès.

SNCF - Communication responsable - AfficheNous avons produits plusieurs outils de communication : une affiche, un petit livret plus détaillé et des fiches thématiques (celles sur l’éco-conception et les événements ont été publiées, deux autres sur l’audiovisuel et le greenwashing sont en projet).

En complément, nous sommes en train de finaliser un « brief de communication » intégrant la partie communication responsable. L’objectif est qu’il soit utilisable tel quel par les communicants dans leurs relations avec leurs prestataires. Ce travail de digestion, d’adaptation est indispensable pour que les communicants s’approprient la démarche.

Nous avons présenté la démarche et les outils aux managers du réseau communication (environ 70 personnes) à l’occasion de la Semaine du développement durable 2011. Nous avons notamment projeté un film dans lequel nous donnons la parole à plusieurs acteurs internes et à deux représentants de l’Ademe et de Sidièse, afin d’expliciter et de concrétiser la démarche.

Les réactions des communicants sont généralement de trois ordres :

  • « On va me dire ce qu’il faut raconter sur le DD mis en œuvre par l’entreprise » alors qu’on veut les conduire vers une autre manière de faire leur métier.
  • « Faire du DD, ça va forcément coûter plus cher ». Oui si les critères de responsabilités sont « ajoutés » à la fin d’un projet, mais absolument pas s’ils sont intégrés dès la conception et le lancement du projet.
  • « La communication responsable, c’est le papier recyclé et imprimé en recto-verso. » Le concept de développement durable est réduit à un fragment de la thématique environnementale et la communication responsable à l’éco-responsabilité des supports.

L’objectif de la démarche est donc de revoir ces a priori largement répandus.

En complément, nous avons intégré ce sujet de la communication responsable dans les formations internes de communication (module des fondamentaux et module sur l’événementiel). Nous y présentons la démarche et diffusons les outils. Pour cela, nous avons formé les formateurs en 2011, avec le cabinet conseil Des enjeux et des Hommes.

Quatre ans après la signature de la charte, quel bilan faites-vous de votre action et quels sont les défis à relever ?

Cette démarche de communication responsable demande beaucoup d’énergie pour mobiliser l’ensemble des acteurs. Comme il y a un fort turn-over dans cette ligne fonctionnelle, il faut régulièrement proposer les formations. Et nous faisons régulièrement des points avec les formateurs pour avoir un retour sur les réactions et les questions des nouveaux communicants.

L’une des difficultés majeures est de faire comprendre aux communicants que la démarche de communication responsable doit intégrer leur cœur de métier pour permettre de réaliser des projets innovants, efficaces et moins chers. Il est certain que l’animation de la démarche par la Direction de la communication (et pas uniquement de la Direction du DD) permettait de crédibiliser la démarche.

Nous avons un noyau dur de convaincus, quelques récalcitrants et tous les autres. Nous essayons de faciliter la vie des communicants avec des outils opérationnels, des règles assez simples même si le sujet en lui-même ne l’est pas ! Notre idée n’est pas de former des experts à l’éco-conception des supports de communication mais des professionnels plus exigeants, en particulier vis-à-vis de leurs prestataires. Il n’y a pas de solution toute prête, facile. Les communicants doivent garder en tête la notion de complexité associée à la responsabilité. Un certain questionnement est indispensable sinon nous risquons de tomber dans le greenwashing. Il faut rendre les questions automatiques, pas les réponses.

Les communications comportant des arguments environnementaux comme celle de Transilien récemment, réalisée avec le Syndicat des transports d’Île-de-France (STIF), sont l’occasion pour nous de réexpliquer les codes en interne.

Heureusement, cette démarche est aussi très gratifiante car les personnes sensibilisées et formées deviennent des ambassadeurs motivés pour faire bouger les lignes. Nous avons d’ailleurs formé une quinzaine de référents (en région et au sein de la direction de la communication) qui sont chargés d’animer les différents réseaux de communicants : diffuser les bonnes pratiques, aider à construire les outils, faire remonter les problématiques…

De surcroît, en plus de la rubrique actuelle « communication responsable » sur le site intranet, nous nous appuyons sur une « Banque des preuves RSE » qui vient d’être lancée. L’objectif de cet outil est de faire savoir à l’ensemble des salariés les actions réalisées dans le groupe par métiers, par régions et en référence aux engagements de l’entreprise. Les actions en communication responsable y trouveront toute leur place.


Documents joints

SNCF – Communication responsable – Affiche (PDF – 437.7 ko)
SNCF – Communication responsable – Livret (PDF – 149.4 ko)
SNCF – Communication responsable – Fiche éco-conception (PDF – 566.4 ko)
SNCF – Communication responsable – Fiche événements (PDF – 441.3 ko)



Publié

dans

par

Étiquettes :