Best-of des publicités (ir)responsables

Cette sélection de publicités françaises récentes montre que le greenwashing n’est pas encore totalement « under control ». Toutefois, les efforts de sensibilisation portent leurs fruits : les cas flagrants sont moins nombreux et il y a même quelques campagnes pertinentes voire responsables.

Le greenwashing n’est plus ce qu’il était. Il faut bien reconnaître que les efforts des professionnels et experts (ARPP, UDA, ADEME), sous la pression des ONG (Observatoire indépendant de la publicité, prix Pinocchio…), ont porté leurs fruits : les cas flagrants et violents de tromperie écologique qui fleurissaient dans la publicité au milieu des années 2000 sont beaucoup moins nombreux.

Toutefois, certaines publicités passent régulièrement entre les mailles de l’autorégulation et le greenwashing peut se faire de manière plus subtile. Démonstration avec une sélection de publicités irresponsables françaises et récentes.

La critique est aisée dit-on souvent, alors voici une sélection de publicités pertinentes qui montre que certains annonceurs/agences font de réels efforts, valorisent leurs engagements de belle manière et sortent des sentiers battus. La publicité responsable, c’est possible.

Une sélection de publicités irresponsables

Voici six campagnes de publicité diffusées récemment (moins de 2 ans) en France qui montrent que l’autorégulation par les professionnels comporte des limites et que la sensibilisation autour des enjeux et des méthodes de communication responsable a encore de beaux jours devant elle.

Dunlopillo – Moi l’écologie ça ne m’empêche pas de dormir

Cette campagne Dunlopillo cumule plusieurs « signes de greenwashing qui ne trompent pas » (selon le guide anti-greenwashing de l’Ademe) : une promesse disproportionnée, des mots vagues, des informations insuffisantes, un faux label, des preuves inexistantes (Lire l’analyse complète).

Carrefour – Nectar of nature

Cette marque du groupe Carrefour, au nom et aux visuels évocateurs, compte 650 références (shampoing, déo, gel douche…) et promet une « fabrication éthique, des ingrédients purs ou Bio, pour une ligne qui cultive la plus naturelle des beautés », une « recette du jardin », bref, « tous les bonheurs de la nature ». Pourtant, la quasi totalité de ces produits ne sont pas bio et nous n’avons aucune aucune preuve sur la fabrication « éthique » ni de précisions sur la « pureté » des ingrédients… (Lire l’analyse complète).

HSBC – Dans le futur, votre investissement immobilier sera encore plus durable

Selon Jean-Marc Gancille (cité par Terra Éco) : « Si l’on se réfère au récent guide anti-greenwashing publié par l’Ademe on en constate presque tous les ingrédients : un mensonge, puisqu’il n’y a rien d’écologique ; des mots vagues ; des informations insuffisantes sur le Web que les conseillers ne sont pas en mesure de clarifier… Par ailleurs, les preuves sont inexistantes et l’image trop suggestive. Bref, une annonce anachronique à un moment où les règles élémentaires d’une communication plus responsable sont diffusées et connues. »

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Asia Pulp Paper – Pour découvrir notre engagement en faveur de la biodiversité, suivez-nous à la trace

Selon le rapport d’une ONG cité par l’Observatoire indépendant de la publicité, « les coupes à blanc des forêts effectuées par APP, notamment dans l’habitat des éléphants, tigres et orangs-outangs, ainsi que les immenses impacts du changement climatiques dus au drainage des tourbières pour établir des plantations à essences rapides, sont complètement contraire à l’image environnementalement responsable que se donne l’entreprise dans sa dernière campagne médiatique. » (Lire l’article complet sur le site de l’OIP).

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E. Leclerc – Label consommation responsable

Voici un exemple d’une nouvelle forme de greenwashing : sous prétexte de mieux informer le consommateur, le distributeur lance un pseudo-label mais ne change rien à ses pratiques. Voici comment Yonnel Poivre-Le Lohé décrypte cette campagne : « Ces derniers temps, E. Leclerc veut jouer le rôle du chevalier blanc de la consommation responsable. Sa dernière idée, un logo « Conso-responsable » pour aider les consommateurs à agir en ayant facilement accès aux produits qui permettent de consommer plus responsable. Mais malgré la campagne de pub TV, le site web dédié et les réponses en commentaire sur les blogs, ce logo « Conso-responsable » représente plus un danger qu’une avancée pour la Consommation Responsable. »

Renault – Zéro émissions (ZE)

Impossible de publier un best-of du greenwashing sans inclure une publicité pour l’automobile, secteur qui use et abuse régulièrement de l’argument écologique. J’ai retenu cette campagne Renault pour ses véhicules électriques mensongèrement qualifiés de « zéro émission ». En tenant compte de la manière dont l’énergie électrique est fabriquée, une équipe de chercheurs américains vient de calculer qu’une voiture électrique émettrait en moyenne 93 g de CO2 par km en France et plus de 200 aux USA (article à découvrir ici). Bien loin de zéro donc !

Une sélection de publicités pertinentes

Face à ces cas flagrants de greenwashing, il est important de montrer que certaines annonceurs et leurs agences conseil sont réellement sensibilisés aux enjeux du développement durable, qu’ils valorisent leurs engagements de belle manière et sortent des sentiers battus.

Camif – Une table qui ne fait que 5 heures de camionnette, c’est chouette

Avec cette campagne d’insertion presse (analyse complète ici), la Camif se positionne de manière pertinente sur le « Made in France » en soulignant les avantages économiques, environnementaux et sociaux de l’achat de meubles fabriqués localement. Un bel exemple de démarche RSE et de communication responsable dont les atouts sont nombreux : un discours clair, des arguments étayés et une pointe d’humour, des reportages vidéos sur les entreprises qui fabriquent ces produits et des compléments d’information sur le site web.

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Les 2 vaches – Dites oui au bien-être des vaches !

Depuis sa création en 2006, la marque Les 2 vaches (Stonyfield Farm/Danone) a régulièrement fait la publicité de son engagement et de l’agriculture biologique en général de manière astucieuse : deux personnages attachants, de l’humour, un ton non moralisateur, des arguments soutenus par des faits… (exemple en 2009). Avec cette nouvelle campagne, la marque aborde un sujet important, rarement traité, celui du bien être animal (sujet sur lequel elle s’engage). La comparaison avec les conditions d’élevage des poules est pertinente : les consommateurs sont de plus en plus nombreux à reconnaître le code (0, 1, 2 ou 3) marqué sur les œufs et indiquant le mode d’élevage des poules. Pourquoi ne pas transposer ce réflexe au lait ?

Magasins U – Partenariat avec les éleveurs de l’association « Les Porcs Bio de France »

À ma connaissance, c’est une première du genre dans une publicité grand public : Système U détaille la répartition du prix de l’un de ses produits (ici des lardons bio). La transparence est totale : 0.63 euros pour les éleveurs, 0.59 euros de charges et de rémunération du magasin, 0.48 euros de frais de transport et de fabrication et 0.09 euros de TVA (total : 1.79 €). Alors c’est sûr, ce niveau de transparence ne concerne qu’un seul produit (autres exemples ici, moins détaillés), bien choisi parce que la plus grande part va aux producteurs. Système U reste un acteur de la grande distribution décriée pour la pression exercée sur les producteurs et pour le modèle de surconsommation qu’il véhicule. Mais cette campagne est courageuse. Elle me donne envie d’avoir la même info pour tous les produits. Utopique ?


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