Dunlopillo : le greenwashing ne les empêche pas de dormir

Avec son matelas fabriqué à partir « de matériaux éco-conçus issus du Développement Durable », Dunlopillo « s’occupe de tout » et fait « du bien à la planète ». Ajoutez un label auto-décerné qui cumule la couleur verte, une ampoule et des petites feuilles : vous obtenez un modèle de campagne de greenwashing.

Tout commence par une publicité Conforama dans les couloirs du métro parisien qui clame haut et fort : « Oui à l’écologie ! Le matelas Dunlopillo à prix Confo ». Mais attention, pas n’importe quel matelas, un matelas estampillé d’un beau label tout vert. Forcément, je suis intrigué :-)

confo-dunlopillo.jpg

Je commence la recherche d’autres publicités sur la chaîne officielle de la marque Dunlopillo et je trouve deux spots datés d’octobre 2012 intitulés « Moi, l’écologie, ça ne m’empêche pas de dormir ! ». La voix off féminine proclame : « Cultiver l’écologie, moi, ça ne m’empêche pas de dormir. Dunlopillo, meilleur pour votre confort, meilleur avec la nature. »

Le descriptif de chaque spot est le suivant (la phrase en capitale, c’est sûrement pour enfoncer le clou, pour bien faire passer le message) :

DUNLOPILLO LANCE LA PREMIERE LIGNE DE LITERIE ECO-CONÇUE, ISSUE DU DEVELOPPEMENT DURABLE.
Une innovation exclusive rendue possible grâce à la participation de Dunlopillo à la création de la première unité de fabrication au monde de matériaux éco-conçus (ECOGEN) issus du Développement Durable, implantée à Flaviac en Ardèche.

Le flagrant délit de greenwashing se confirme. Waouh, des matériaux « éco-conçus issus du DD » : difficile de faire plus vert ! Première usine « au monde » : difficile de faire plus innovant ! Par contre, je ne sais toujours rien sur cette fameuse innovation.

Ah, ils ne parlent pas du Made in France ; ce sera peut-être pour la prochaine campagne :-)

Ensuite, naturellement, je me rends sur le site de la marque pour obtenir les informations sur cette intrigante innovation Ecogen. Et je ne suis pas déçu du voyage !

Voici le message proposé par la marque sous la forme d’une animation de presque deux minutes (précision : je n’ai pas modifié le style, il s’agit d’une retranscription fidèle) :

« Bien sûr, vous savez ce qu’est le développement durable. Bien sûr puisque vous entendez parler de tri par ici, de recyclage par là et d’écologie ici et là. Et bien, au lieu d’aller planter des arbres à Tombouctou comme certains, Dunlopillo agit avec une vraie idée : faire du bien à la planète !
Comment ? C’est simple. Prenez une usine, rénovez-là et créez dedans une nouvelle matière première Ecogen, grâce à un procédé révolutionnaire, mais vraiment révolutionnaire. Alors là, chapeau bas, parce qu’en plus d’être précurseur, ça sauve aussi des emplois.
Oui, bon d’accord, mais comment ça se passe en vrai ? Récoltez du mobilier ancien. Séparez les matières. Transformez le tout avec des experts, pour que ce soit vraiment parfait. Chauffer à 190° pour éliminer les COV, les mauvaises substances quoi. Et hop ! vous obtenez une nouvelle matière de qualité écoconçue avec les mêmes densités que les autres mais qui est encore mieux aérée : la mousse Ecogen.
Oui bon, d’accord, mais après on en fait quoi ? Et bien l’idée géniale, c’est de l’intégrer dans les matelas Dunlopillo. Comme ça, vous avez un matelas avec au moins 50 % de matériaux écoconçus dedans. (Et même que bientôt, Dunlopillo il fabriquera un matelas tout entièrement écoconçu à 100 %, vous imaginez ?). Rajoutez une pincée de fermeté, une bonne dose de confort, tout ça grâce à la super-méga technique du surmoulage. Et voilà, un matelas tout neuf qui ne manque vraiment pas d’air et qui participe à la protection de la planète.
En plus, ce matelas bénéficie du système no-flip, donc, ce n’est plus la peine de le retourner. Voyez ? Alors là, respect de chez respect. Bien sûr, vous savez qu’être écolo ce n’est pas toujours facile, pour vous peut-être, pour votre voisin sans doute, mais pour moi qui vous parle, ça ne m’empêche pas de dormir.
Avec le matelas en mousse Ecogen, Dunlopillo s’occupe de tout. Et ça, c’est meilleur pour mon confort et meilleur pour la nature et meilleur pour mon portefeuille aussi. Bref, avec Dunlopillo, c’est meilleur, encore et toujours plus meilleur. »

Incroyable, non ? Que dire… sinon que l’on retrouve dans cette vidéo une série d’expressions typiques d’une opération de greenwashing : une vraie idée / du bien à la planète / c’est simple / c’est parfait / idée géniale / qui participe à la protection de la planète / Dunlopillo s’occupe de tout / meilleur pour la nature… Cela manque sérieusement de précisions sur le bénéfice environnemental, économique et social de cette « innovation » et sur le nombre de produits de la marque concernés, de modestie sur l’impact d’une telle innovation sur « la planète ».

Si l’on ajoute la tentative de nous vendre une action qui n’est encore que dans les cartons (le matelas 100 % écoconçu) et le label auto-décerné de couleur verte, je crois que l’on atteint des sommets de manipulation avec cette campagne !

dunlopillo_web1.jpg

En complément de cette analyse, je vous invite à découvrir le témoignage de Jacques Bouquet, Directeur des opérations réglementaires du groupe Cauval, propriétaire de la marque Dunlopillo.


Publié

dans

,

par

Étiquettes :