Une publicité Citroën suscite de nombreuses critiques sur les réseaux sociaux. La raison ? Elle incite à faire des kilomètres au volant de sa voiture plutôt que de faire une balade à vélo et elle utilise la fin du bonus écologique comme argument commercial. Selon moi, elle contrevient à la Recommandation Développement durable et la Doctrine ARPP sur le bonus/malus. Je viens de la signaler au Jury de déontologie publicitaire.
Descriptif du spot incriminé
Une voiture se gare en forêt, des vélos sont accrochés à l’arrière du véhicule. Le terrain est plat, des personnes passent en vélo à proximité. À l’intérieur, les parents discutent : « C’est ça nos balades tranquilles à vélo ? C’est une blague ? » « Non mais attends, tu as vu le dénivelé ? » « J’ai bien vu le dénivelé, c’est l’Alpe d’Huez » « C’est totalement inconscient ça, avec la petite. Chérie, tu te sens de faire ça à vélo toi ? Elle est terrifiée, bien sûr. » « C’est hors de question » « On va y aller parce que là ça commence à me… » « C’est la dernière fois qu’on écoute ton cousin ». Voix off : « Pas facile de quitter le confort de C5 Aircross Hybride. En juin, Citroën vous simplifie l’accès à la technologie hybride rechargeable. Profitez-en avant la baisse du bonus écologique ».
Une publicité contraire à la Recommandation DD et à la Doctrine bonus/malus
La publicité met en scène un couple qui se rend dans un bois en voiture pour y faire une balade en vélo avec leurs enfants mais qui finalement change d’avis et fait demi-tour, sous prétexte qu’il est difficile de quitter le « confort » du véhicule. Malgré le ton humoristique du spot publicitaire, le message est clair : faire du vélo est fatiguant, il est bien plus tentant de rester en voiture, ce qui est contraire aux recommandations du gouvernement en matière d’écologie et de santé publique.
Par conséquent, cette publicité ne respecte pas le point 1.2 de la Recommandation Développement durable de l’ARPP qui précise « La publicité ne doit pas discréditer les principes et objectifs, non plus que les conseils ou solutions, communément admis en matière de développement durable. La publicité ne saurait détourner de leur finalité les messages de protection de l’environnement, ni les mesures prises dans ce domaine. »
L’argument « profitez-en avant la baisse du bonus écologique » est également un argument mal placé. Si le bonus écologique baisse, c’est que le véhicule ne correspond plus aux objectifs de lutte contre le changement climatique promu par le gouvernement. Il est donc inapproprié d’utiliser cet argument pour générer un sentiment d’urgence et inciter à l’achat du véhicule. Cela contrevient à la « Doctrine ARPP Bonus/Malus gouvernemental appliqué au secteur de l’automobile » (actualisée en avril 2020) qui indique que « Toute communication diffusée sur le territoire français doit éviter toute utilisation abusive du dispositif gouvernemental ».
Double-faute donc pour ce spot publicitaire que je viens de signaler au Jury de Déontologie Publicitaire.
Le stéréotype de la voiture pour faire la sortie vélo du dimanche
Si ce n’est pas encore explicite dans la recommandation Développement durable de l’ARPP, la profession commence à prendre conscience de l’importance des stéréotypes véhiculés par la publicité (sans mauvais jeu de mots). L’Union des marques a ainsi récemment publié un guide sur les représentations des comportements éco-responsables en publicité. Entreprises pour l’Environnement prépare un autre guide pour aider les annonceurs et leurs agences à lutter contre les 10 principaux stéréotypes dans la pub.
Comme cela a été justement identifié par une personne sur Twitter, cette publicité laisse croire qu’il faut obligatoirement une voiture pour faire du vélo, comme s’il n’était pas possible de partir de chez soi directement à bicyclette ! C’est un exemple de stéréotypes contre lequel il est important de lutter. Au-delà du message direct « On est bien plus confortablement installé en voiture que sur un vélo », cette pub ne donne pas une bonne image du vélo.