Publicité et environnement : 7,5 % de publicités non conformes en 2022

Depuis 2007, l’Agence de la transition écologique (ADEME) et l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP) réalisent le bilan « Publicité & Environnement ». L’objectif est de suivre l’évolution dans le temps du bon respect des règles déontologiques relatives à l’écoblanchiment, d’inciter à l’adoption d’une posture de communication plus responsable et d’enrichir le dialogue entre parties-prenantes au sujet des campagnes de publicité en relation avec les enjeux écologiques. Mathieu Jahnich est l’expert mobilisé par l’ADEME pour réaliser ce bilan, depuis 2015.

Le 11e bilan a été publié mi-juillet 2023. Ce nouveau bilan porte sur plus de 39 000 publicités diffusées en juin, septembre, octobre et novembre de l’année 2022 : insertions presse, publicité extérieure (affichage et panneaux numériques), radio, films YouTube, posts Facebook (un jour par mois) et bannières web (un jour par mois également). L’analyse repose sur la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP, dans sa version en vigueur depuis août 2020.

Sur 1 889 publicités diffusées pendant la période et qui utilisent l’argument écologique, 142 ne respectent pas les règles déontologiques (qu’il s’agisse de manquements ou de réserves), soit un ratio de 7,5 %. Cela représente une baisse de 4 points de pourcentage par rapport au dernier bilan (11,6 % en 2019). Cette amélioration est encourageante mais la situation reste préoccupante, à plusieurs titres :

  • 7,5 % de non-conformité, cela reste 75 à 180 fois supérieur aux taux obtenus dans les autres bilans thématiques publiés récemment par l’ARPP : 0,1 % pour le dernier bilan d’application de la recommandation « Comportements alimentaires » (2021) et même 0,04 % pour le dernier bilan « Image et le respect de la personne » (2022). La Recommandation « Développement durable » semble ne pas être considérée avec le même sérieux par les acteurs que les autres règles déontologiques.
  • Ce taux de non-conformité de 7,5 % est une moyenne. Il varie de façon significative selon le format publicitaire : 13 % pour la presse, 11 % pour les bannières web, 8 % pour Facebook, 6% pour la radio, 4% pour les vidéos web et 1 % pour l’affichage. Ainsi, une publicité sur huit dans la presse (pour moitié sous la forme de publi-rédactionnels) et une sur dix sur Internet (bannières) induit le public en erreur sur la qualité écologique du produit ou du service promu : c’est considérable. Comment peut-on demander au public de faire des choix de consommation plus éclairés si les informations qui lui sont transmises sont trompeuses ?

Trois autres enseignements de ce bilan méritent d’être soulignés :

  1. Plus de 70 % des non-conformités (manquements et réserves) s’expliquent par un non-respect de deux points de la Recommandation Développement durable : vocabulaire (40 %) et proportionnalité (33 %). Les allégations comme « responsable », « éco-responsable », « écologique », « propre », « clean », « vertueux », « prendre soin de la planète », « durable », « respectueux de l’océan », « sans impact », « éthique et responsable », « sain pour la planète », « faire du bien à la planète », « bon plan pour la planète », « dans le respect de l’environnement », « doux pour l’environnement »… sont encore très souvent employées sans être nuancées et de façon disproportionnée par rapport aux propriétés du produit ou service promu. Cela est contraire aux règles déontologiques.
  2. Comme en 2019, les publi-reportages dans la presse occupent une place significative dans les non-conformités (ils en représentent plus du quart). Ils permettent aux marques d’adopter une approche pédagogique et de développer leur argumentaire. La vigilance devrait être maximale sur ces formats, comme sur tous les autres, au moment de la rédaction et de la validation de l’ensemble des contenus, notamment les titres, intertitres, encadrés et illustrations. Si l’annonceur porte une part de responsabilité, les équipes des médias, qui cherchent à pousser ces formats publicitaires, ne sont visiblement pas assez attentives au risque de greenwashing.
  3. Une dizaine de non-conformités concernent des publicités pour des produits ou services où le moindre impact environnemental est attesté par un écolabel officiel mais avec un vocabulaire ou un visuel excessif. Rappelons que les règles déontologiques concernent tous les acteurs économiques, même les entreprises reconnues pour être très engagées. Elles se doivent d’être exemplaires également dans leur posture de communication et leurs messages publicitaires.

L’éco-blanchiment freine la transition vers des modes de vie plus soutenables : il sème le doute sur la réalité des efforts à entreprendre, il empêche de repérer les produits et services réellement moins impactants, il représente une forme de concurrence déloyale envers les entreprises qui s’engagent en profondeur et communiquent de façon responsable et il contribue à la perte de confiance du public envers le discours des organisations sur les enjeux écologiques.

La publication de ce nouveau bilan « Publicité & Environnement » intervient dans un contexte où les Français sont de plus en plus sensibles au greenwashing et où les interpellations sur les réseaux sociaux se multiplient, par des collectifs ou des individus qui agissent comme lanceurs d’alerte. Le respect des règles d’éthique apparait donc comme un élément central de la crédibilité publicitaire, qui doit être consolidée.

Pour télécharger le Bilan Publicité et environnement 2022, cliquer ici.


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